Les mauvais souvenirs???? je n'en ai pas ... je préfère les oublier.
Pourtant un anniversaire approche; bientôt les cerises seront rouges... C'était il y a cinq ans, par un mois de juin où il faisait un temps auquel on cherche vainement des excuses. Il faisait gris, et froid, le ciel pleurait. Mon Pégason allait mourir.
Oui, je savais qu'il était vieux; vingt-huit ans, c'est beaucoup pour un anglo. Mais il était encore si joyeux, si fringant... un peu moins sans doute depuis que la jument était morte. Inséparables ces deux-là; plus de vingt ans de pâture commune. Inséparables au point qu'il fallait ruser pour monter l'un quand on laissait l'autre au pré.
Elle, percluse de rhumatismes, de santé fragile , on attendait sa fin depuis longtemps, il n'y avait pas eu de surprise. Et lui, à son départ, n'avait pas bronché mais six mois plus tard, je l'ai vu dans le pré... triste. Je l'ai sellé plus pour le distraire que par réelle envie de monter.
Nous sommes partis, il trottait, cassait des branches qu'il croquait de bon coeur et puis soudain... comme un coup de frein... il n'avançait plus. Je l'ai stimulé, sans résultat; je l'ai mis sur le chemin du retour ce qui généralement lui faisait allonger le pas; il n'avançait pas mieux. Alors j'ai mis pied à terre et nous somme rentrés tout doucement.
J'ai appelé le vétérinaire... verdict sans appel: crise cardiaque. La jugulaire battait... battait... Rien d'autre à faire que la dernière injection. Je n'ai pas pu! Voir s'effondrer ce grand costaud était au-dessus de mes forces.
Après m'être assurée qu'il n'allait pas souffrir, j'ai préféré laisser faire la nature. Il y avait juste de temps à autre à lui faire une piqûre pour le soulager d'un emphysème pulmonaire provoqué par son état.
Il était conscient au point de faire avec ses dents on boucan d'enfer sur son abreuvoir quand il avait besoin de son injection.
Il n'y avait plus qu'à attendre. Chaque matin commençait une nouvelle journée d'angoisse et de chagrin . C'était pitié de le voir décliner, de plus en plus maigre, les os perçant presque la peau puisqu'il n'assimilait plus la nourriture. Jusqu'à quand? Combien de temps encore? Ai-je eu tort ou raison? Fallait-il préférer l'arrachement brutal à la déchirure lente? Faire cesser la souffrance, mais la souffrance de qui? De celui qui inconscient, profitait du peu de vie qui lui restait ou la mienne?
Et puis un matin, je ne l'ai pas vu; il était tombé tout en bas du pré, dans l'ornière qui nous sépare du champ voisin. Il vivait encore et s'agitait. Alors le vétérinaire est venu; je lui ai donné un dernier sucre qu'il n'a pas avalé. Il s'est endormi vite... la pluie avait cessé et le champ était sec quand le fourgon de K.I.O est venu.
Et là encore... il a fallu lui lier les pieds, le tirer dans le fourgon où il n'était pas seul - c'est une tournée que fait K.I.O.
Puis le hayon s'est refermé, le camion est parti et là... là...mettre la bride à l'imagination, ne pas penser... surtout pas, à ce qui va se passer ensuite...
Et voyez-vous, quand on me demande pourquoi je n'ai pas un autre cheval... eh bien, c'est pour ça! Je ne crois pas pouvoir vivre une autre fois ces dernières semaines sous la pluie, ni ce départ dans le soleil du matin...non... je ne crois pas...
P.
5 commentaires:
C'est une belle histoire- je crois comprendre que l'on peut dire ainsi-qui commence par sa fin et qui donnerait envie au lecteur néophyte que je suis du monde des chevaux, d'en savoir plus. Mais si j'emploie le conditionnel c'est qu'il existe des souffrances à ne sans doutes pas partager, à réserver dans un coin de soi. Aussi, c'était juste et égoïstement une manière, oh combien malhabile, de dire: "ce texte, il m'a touché"...
Oh! Jean-Jacques, c'était surtout une très belle histoire et qui n'a pas mal fini puisqu'il est mort sans souffrance à l'âge où un cheval doit mourir...
En fait j'ai été "taguée" et j'ai six trucs perso à raconter dont un "mauvais souvenir" et ce mois de juin d'il y a cinq ans en est un. En fait je n'y pense jamais et j'ai raconté ça aussi pour ceux à qui vient l'envie d'avoir un cheval pour compagnon afin qu'ils sachent que ça se termine comme ça "dans le meilleur des cas"
P.
Ton histoire m'a touchée. C'est sûr qu'on s'attache aux bêtes, et même parfois plus qu'aux êtres que nous côtoyons!
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Bon dimanche et à bientôt*******
Bon sang, quand je pense à Max et aux trois autres, je me dis qu'un jour, n'est-ce pas....c'est vrai que ça file un sacré choc, tous ceux à qui s'est arrivé le disent !
Oh Pomme, quelle tristesse, et comme tu en parles bien. J'en ai les larmes aux yeux.Je comprends mieux tes différentes interventions, ici ou là, à propos des chevaux.
Elle est bien belle la photo, sur ton tout nouveau blog !
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