C’était compter
sans la comète ! Une comète d’une grosseur prodigieuse, dont la longue
queue balaya le ciel de 1664 pendant quinze jours. Tout le monde était
épouvanté et l’on ne pouvait que prévoir de funestes événements.
Pourtant la
Fronde s'éloignait, Mazarin était mort depuis trois ans, Fouquet emprisonné.
Louis XIV s’affirmant comme monarque absolu, commençait la transformation de
Versailles et allait faire du modeste
rendez-vous de chasse de son père, un des plus beaux palais d’Europe. Colbert
devenait ministre d’état et surintendant des Bâtiments Royaux, tandis que
Louvois était nommé secrétaire d’Etat à la Guerre et Dieu sait qu’il allait
avoir à faire. Une révolte contre la gabelle éclatait dans les Landes tandis
que chez nous, on apprenait pourquoi monsieur de Majenville, vice-bailly de
Chartres n’avait pu porter secours à son ami Saint-Bonnet. Homme d’esprit, fort
intelligent, adroit aux armes , bon et intrépide cavalier, apprécié de la Cour,
bref, ce parfait homme de qualité était accusé de vol et pire de fabriquer de
la fausse monnaie.
Voici comment on
découvrit l’affaire.
Monsieur de
Majenville avait une servante qui allait à confesse. Le prêtre, dénommé Lair à
qui elle confia savoir que son maître trafiquait les monnaies refusa de lui
donner l’absolution. Furieuse, elle ne put s’empêcher de s’en plaindre de telle
sorte que Majenville apprit que le prêtre était au courant de ses manigances.
Le Vice-Bailly,
prenant prétexte que Lair tirait sur ses pigeons et détenait des armes sans
autorisation, le fit emprisonner. Et comme un prisonnier peut encore parler,
Majenville paya le geôlier pour qu’il assassine en douceur le malheureux
prêtre. Mais le pauvre homme avait des amis ; on commença à beaucoup
parler, du sort du curé et des raisons pour lesquelles il en était là.
Majenville allait employer les grands moyens ; un nuit, alors que toute la
ville dormait, il fit enfumer le cachot et Lair mourut asphyxié. Mais avant de
trépasser, il eut le temps de dénoncer le vice-bailly et de clamer qu’il
mourait pour avoir dit la vérité. Il fut entendu de prisonniers des cellules
voisines et d’autres témoins. Le lendemain matin, on le trouva mort, à genoux
et serrant son bréviaire. Il eut droit à d’honorables funérailles et quelqu’un
sur sa tombe fit mémoire d’une prophétie de Nostradamus qui disait :
En l’an 1664,
Lair sera étouffé en prison de Chartres
Le geôlier
assassin fut arrêté, mis aux fers et soumis à la torture il avoua toute
l’affaire , après quoi, il fut condamné à être rompu.
Majenville donc,
fut découvert et obligé de fuir au plus vite ; sa fausse monnaie circulait
un peu partout et l’affaire portée devant le Roi, le monarque le fit poursuivre
par le Prévôt fortement escorté. Des barrages furent établis avec ordre de
vérifier les identités de tous les voyageurs ; on placarda des affiches
avec outre le nom de Majenville, celui de son beau-frère, le Sieur de
Sainte-Agnès et d’encore un autre beau-frère. Tous furent pendus en effigie.
Peine perdue, on ne revit jamais aucun des trois compères. Ce qui se montra
souvent en revanche, ce sont leurs faux louis de trente sols chacun qu’on
appela des « Vice-Bailly ».
Si ce vice-bailly avait disparu,
on entendit encore parler de lui et pour apprendre d’autres de ses exploits.
Son successeur, un nommé La
Louvery arrêta un de ses anciens valets nommé Courville . Torturé et condamné à
être rompu vif en place publique à Chartres confessa cette histoire.
Majenville et ses complices
avaient attaqué un chariot convoyant de l’argent royal dans a région de Lyon.
Le coup fait, le vice-bailly galopa à bride abattue et réussit à arriver à
Paris avant le messager de la mauvaise nouvelle. Il était donc à la cour pour
entendre le récit de l’échauffourée et c’est à lui, le chef des voleurs, que
fut donné l’ordre d’enquêter et de poursuivre les brigands.
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