Montreuil sûr de lui,
les mains aux hanches s’avança dans la cour prétendant parvenir à amener La Noë
et les siens à se rendre : mal lui en prit. La Noë retranché dans le
grenier, visant par un trou du toit, d’un seul coup de pistolet resté fameux,
cassa la tête de Montreuil, le bras d’un sieur Defern et creva l’œil d’un
troisième.
Chateaudacier, quand on vint lui apprendre la mort de Monsieur de
Monteuil entra dans une rage folle que l’épouse de Pronsac ne contribua guère à
calmer. « J’en suis bien aise ! » dit-elle en entendant le
messager. Chateaudacier lança une bordée de jurons et lui répliqua :
« Mon neveu et mort et ton mari va y passer ! » Là-dessus, il
s’empare d’un pistolet et le décharge dans la tête du malheureux Pronsac
toujours lié et garrotté dans une chambre voisine.
Pronsac liquidé, le tour de La Noë était venu. Retranché sous les toits
dont plus une tuile n’était entière, il était devenu une cible facile. Il ne
trouva pour bouclier qu’une sorte de grand plat d’étain ; un seul
coup en vint à bout.
Comme il ne tirait plus ni ne se montrait, les assaillant
s’enhardirent, cassèrent les portes et mirent la maison à feu et à sang. Seuls
réchappèrent un nommé Vaugrain et un nommé Lejouffac, qui parvinrent à
s’enfuir.
Un certain Dumoulin se laissa tuer comme un crapaud, sans se
défendre ; les frères Duprez, Lafleur, cuisinier de monsieur de Manou et
un nommé Lalandre, restèrent sur le terrain. On entassa les corps avec ceux de
la Noë et Pronsac dans une charrette. Ils furent conduits à Dreux puis à Paris
où on les enterra au cimetière des Innocents.
Après qu’ils eurent fini de ramasser les morts, force fut aux conjurés de
constater que l’affaire pour eux n’était pas terminée : Saint Bonnet
l’aîné courait toujours et allait certainement chercher à venger ses frères.
Le maréchal de Senneterre désireux de remettre un peu d’ordre dans la
pays et ayant appris que Saint Bonnet était parti aux trousses de Chateaudacier,
réfugié à Marville, se rendit sur place pour tenter une médiation. Il présenta
d’abord ses condoléances à Saint Bonnet et lui demanda de tourner la
page ; continuer la lutte ne lui rendrait pas ses frères. Saint Bonnet lui
représenta la douleur où il était d’avoir les avoir perdu si brutalement, l’un au
gué des Graviers et l’autre froidement exécuté par Chateaudacier. Senneterre
alors, prit l’engagement d’obliger ses adversaires à le laisser en paix, si
lui-même faisait un geste de conciliation. Seul désormais, il ne pouvait
qu’accepter ; on fit alors sortir Chateaudacier de la chambre où il
s’était calfeutré. Les deux adversaires se donnèrent l’accolade et on put espérer
que l’affaire terminée, le pays allait retrouver un peu de calme.
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